Le Gourdin et le Fleuret

L


Voici que le gourdin primitif et grossier
Invite le fleuret à quelques passes d’armes,
Trop fruste pour saisir que ce profil princier
N’est en rien comparable à sa lourdeur sans charmes.

L’adversaire n’étant qu’un drôle roturier
Assuré qu’une bûche assomme d’éloquence ;
Qui, montrant tout d’un nœud de lignage ordurier,
Ignore de son bois la crasse inconséquence,

Le fleuret magnanime, ayant pour lui l’acier
(Que déshonorerait pourfendre une pauvre âme),
Décide d’étourdir le bretteur putassier
Sans jouer d’un estoc pouvant conduire au drame.

Alors il virevolte, épuisant le grand troll
Qui, désorienté par l’épée alouette,
S’écroule avec fracas comme un gros tronc au sol
Devant l’insaisissable et vive silhouette…

Le butor, équipé d’un front trop bas pour voir
Que s’arrête son crâne où le cerveau commence,
Enfant que la nature oublia de pourvoir
De grâce, est bienheureux s’il croise la Clémence.


À propos de l'auteur

Julien Albessard

Misanthrope humaniste, atrabilaire joyeux, rêveur rationnel, insulaire sociable et enthousiaste résigné, comme tout le monde, je ne suis comme personne.

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